Stéphanie Muzard Artiste engagée et paysanne bio

Stéphanie Muzard  Artiste engagée et paysanne bio

OGM, Bill Gates, Monsanto, eugénisme, et notre élue au parlement européen.

Catherine Grèze sobre la Fundación Gates y los transgénicos from Rafa Font on Vimeo.

Je remercie Catherine, de son envoi et de ses informations.
La bataille continue.
Et j'ai aussi reçu d'autres nouvelles transgéniques, éplucher quelques trucs, comme ça, pendant qu'on peut encore éplucher... ! Voir en fin d'article ! HUUUUUMMMM y'a bon l'eugénisme, la dictature !...ça sent un peu le gaz zyklon B ou le défoliant, non? ah....non ?!


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Budget UE: Bill Gates demande de maintenir les objectifs d'aide au développement

DEVE Développement et coopération − 25-01-2012 - 14:46 Mise à jour
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L'Union européenne doit maintenir l'objectif d'aide au développement de 0,7 % du revenu national brut dans son cadre financier pluriannuel (budget à long terme) pour 2014-2020, a estimé Bill Gates devant les membres de la commission du développement, mardi.

M. Gates a fait observer qu'il citait l'aide au développement de l'UE comme exemple face aux dirigeants chinois ou au Congrès américain, lorsqu'il leur demande de porter leur action au niveau de celle de l'UE.

"Qu'on le veuille ou non, l'Union européenne est leader en matière d'aide au développement et je doute fort qu'on puisse continuer à la citer en exemple si cette aide n'est plus maintenue. C'est d'autant plus important lorsqu'on regarde le budget à 7 ans de l'Union. Je sais que vous avez des compromis à faire vu la situation économique, mais l'argent que vous consacrez au développement aura un impact énorme à l'échelle planétaire" a affirmé M. Gates.

En tant que co-président de la fondation Bill & Melinda Gates, M. Gates a rappelé que "Living proof" sauve des vies dans les pays les plus pauvres de la planète. "Je pense que cette image est plus belle que n'importe quel hymne européen", a-t-il déclaré en présentant un graphique de la mortalité infantile, passée de 20 à 8 millions de décès au cours des 50 dernières années.

Appelant l'attention sur la réduction de 99 % des cas de polio depuis 1988, il a fait observer que les vaccins sont un moyen peu coûteux permettant de sauver des millions de vies.

Les députés, à une large majorité, se sont félicités de cette présentation, malgré certaines critiques à l'égard des liens entre la fondation Gates et Monsanto, une entreprise de biotechnologie qui cherche à introduire des semences hybrides en Afrique.

Catherine Grèze (Verts/ALE, FR) a tenu les propos ci-après: "Nous savons que la majorité des pays d'Afrique sont opposés à l'introduction d'OGM. Est-il vrai qu'un des objectifs du centre de recherche financé par votre fondation est d'ouvrir la voie d'un changement dans la législation, afin que des semences de coton transgénique puissent être introduites au Kenya, alors que vous savez qu'une des principales inquiétudes des pays en développement est la perte du contrôle des semences indigènes ?"

M. Gates a répondu que Monsanto travaille actuellement à un projet de développement de variétés de maïs résistant à la sécheresse, sans royalties, et vu que tous les dirigeants africains entendent lutter contre la famine et la malnutrition, le moment était peut-être venu de s'ouvrir à de nouvelles solutions. "Des semences nettement plus résistantes à la sécheresse permettront de sauver des milliers de vies" a-t-il insisté.

Le Président du Parlement, Martin Schulz, s'est dit profondément impressionné et admiratif face à l'action de la Fondation Gates, et a souligné que l'Union européenne avait le devoir moral d'afficher sa solidarité à l'échelle internationale, vu qu'elle représente 8 % de la population mondiale, mais aussi 30 % de la richesse mondiale.

"Nous devons tenir nos promesses si nous ne voulons pas mettre notre crédibilité en péril, et j'espère que, indépendamment des tendances politiques au sein de notre assemblée, le Parlement accordera son soutien aux objectifs de la Fondation Gates" a déclaré M. Schulz.Budget UE: Bill Gates demande de maintenir les objectifs d'aide au développement

DEVE Développement et coopération − 25-01-2012 - 14:46 Mise à jour
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Bill Gates urges Parliament to retain development aid goals in next EU budget
DEVE Development and cooperation - 23-01-2012 - 17:17
 
The EU should retain its development aid commitment of 0.7% of Gross National Income in its multi-annual financial framework (long-run budget) for 2014-2020, Bill Gates told the Development Committee on Tuesday.



Mr Gates stressed that he cites the EU approach to development as an example when urging Chinese leaders or the US Congress to step up their development aid to the same level.



"Whether you like it or not, you are the leader in development aid and it is very unlikely we can do without this example if Europe does not continue its upward push. This is particularly important as you are looking at your 7-year budget. I know you have some difficult trade-offs to make because of the economic situation, but the money you devote to development will have a huge impact in the world", said Mr Gates.



Speaking as co-chair of Bill & Melinda Gates Foundation, Mr Gates offered "living proof" that development aid "works" to save lives in the world's poorest countries. "I think this picture is more beautiful than any European anthem", he said, presenting a graph showing that child deaths have fallen from 20 million to under 8 million in the past 50 years.



Mr Gates also noted that vaccines are an inexpensive way to save millions of lives, citing a 99% reduction in polio cases since 1988.



MEPs were almost unanimous in their praise of this presentation, although some criticized the Gates Foundation's links to Monsanto, a biotech company that is trying to introduce hybrid seeds in Africa.



Catherine Grèze (Greens, FR), asked "we know that the majority of African countries are against GMOs. Is it true that one of the objectives of research centre financed by foundation is to pave the way to change the laws so that cotton GMOs can be introduced in Kenya, even knowing that one of the major concerns of developing countries is losing control of their own seeds?"



Mr Gates replied that Monsanto was currently working on a project to develop royalty-free drought resistant maize, and that since all African leaders are certainly against starvation and malnutrition, it was about time that they looked into new tools. "Seeds that are dramatically more drought resistant will benefit thousands of lives", he insisted.



Parliament's President Martin Schulz said he was "deeply impressed and fascinated" by the work of the Gates Foundation and stressed that EU has a moral duty to show international solidarity, given that it accounts 8% of the global population, but 30% of global wealth.  



"We have to deliver on our promises if we do not want to risk our credibility and I hope that, irrespective of political colours in this house, Parliament will stand shoulder to shoulder with the aims of Gates Foundation", said Mr Schulz.



REF. : 20120123IPR35958


Mis à Jour le : 11 janvier 2012  14:12
OGM : Wikileaks révèle les détails d'une offensive US visant l'Europe
11 janvier 2012

De nouveaux câbles diplomatiques américains publiés par Wikileaks révèlent une offensive concertée - en lien étroit avec le gouvernement espagnol - allant jusqu'à des représailles, pour obtenir que l'UE revienne sur ses décisions concernant les OGM. Au premier rang des « coupables » la France était tout particulièrement ciblée. Les USA ont également déployé de nombreux efforts en direction du Vatican, espérant obtenir du Pape une déclaration publique en faveur des OGM. On découvre aussi dans ces documents que diplomates, gouvernement et dirigeants de Monsanto travaillaient main dans la main sur cet dossier jugé comme « stratégique » pour les USA.

Par John Vidal, Guardian, 3 janvier 2011 [1] (extraits)

L'ambassade américaine à Paris a recommandé à Washington de déclencher une offensive de guerre commerciale contre tout pays de l'Union Européenne s'opposant à l'introduction des organismes génétiquement modifiés (OGM), révèlent de nouveaux câbles diplomatiques publiés par Wikileaks.

En réponse à la décision de la France d'interdire une variété de maïs OGM de Monsanto, fin 2007, l'ambassadeur, Craig Stapleton, ami et partenaire en affaires de l'ancien président américain George Bush, a demandé à Washington de pénaliser l'Union européenne et en particulier les pays qui n'approuvent pas l'utilisation des cultures OGM.

« L'équipe de Paris recommande que nous élaborions une liste de représailles ciblées, qui provoqueraient quelques douleurs à l'UE - puisqu'il s'agit d'une responsabilité collective - mais qui se focaliseraient également en partie sur les pires [sic] coupables.

« Cette liste devrait [inclure des propositions] qui soient mesurées plutôt que brutales et pouvant être durable sur le long terme, car nous ne devons pas nous attendre à une victoire rapide. En effectuant des représailles il sera clair que la voie suivie actuellement implique des coûts réels pour les intérêts européens, et cela pourrait aider à renforcer les voix européennes qui sont en faveur des biotechnologies », écrivait Stapleton, qui détenait en co-propriété avec Bush l'équipe baseball de Dallas / Fort Worth des Texas Rangers dans les années 1990.

Dans d'autres câbles récemment publiés, on apprend que des diplomates américains du monde entier ont promu les cultures OGM, vues comme un enjeu stratégique pour l'Amérique et son commerce extérieur.

De nombreux évêques catholiques dans les pays en développement étant farouchement opposés à ces cultures controversées, les Etats-Unis ont exercé des pressions visant tout spécialement les conseillers du pape.

Les câbles de l'ambassade américaine au Vatican montrent que les Etats-Unis estimaient que le pape était devenu globalement favorable aux cultures OGM, après une campagne d'intense lobbying sur les conseillers Saint-Siège, mais regrettaient toutefois qu'il n'ait pas encore déclaré publiquement son soutien. Le conseiller spécial sur les biotechnologies du Département d'Etat américain et des conseillers du gouvernement sur les biotechnologies ont fait pression pour convaincre des membres du Vatican de persuader le pape prendre position publiquement.

« Il existe des possibilités de faire avancer cette question avec le Vatican, et ensuite d'influencer un large part de la population en Europe et dans le monde en développement », indique un câble.

Ces câbles montrent également les diplomates américains travaillant directement pour des compagnies comme Monsanto. « En réponse aux récentes demandes urgentes de Josep Puxeu [ ministre espagnol chargé de l'agriculture ] et de Monsanto, le gouvernement américain a renouvelé son soutien à la position de l'Espagne [...] sur les biotechnologies agricoles par le biais d'intervention à haut niveau du gouvernement américain. »

Il ressort également que l'Espagne et les Etats-Unis ont travaillé en lien étroit pour persuader l'UE de ne pas renforcer les lois sur les OGM. Dans un câble de l'ambassade de Madrid, on lit : « Si l'Espagne tombe, le reste de l'Europe va suivre. »

Les câbles montrent que le gouvernement espagnol a non seulement demandé aux Etats-Unis de maintenir la pression sur Bruxelles mais que les Etats-Unis savaient à l'avance comment voterait l'Espagne, avant même que la Commission espagnole de biotechnologie ne l'ait indiqué.


Publication originale Guardian, traduction Contre Info

[1] Une première version de cette publication comportait une erreur de datation de l'article du Guardian - ndlr 


source : http://www.contreinfo.info/article.php3?id_article=3160#nb1


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FRANCE – Arrêté sur la coexistence : bientôt du « non OGM » avec (un peu) d'OGM ?
par Christophe NOISETTE , janvier 2012

Le gouvernement français vient de notifier à la Commission européenne son projet d'arrêté concernant la coexistence des filières OGM et non OGM [1]. Cet arrêté, signé Bruno Le Maire, ministre de l'Agriculture, fait suite à l'avis du Haut conseil des biotechnologies (HCB), présenté début janvier, mais ne suit pas l'esprit de cet avis.



Le Comité scientifique (CS), dans son avis du 15 décembre 2011, avait proposé des solutions techniques pour permettre la coexistence des filières GM et non GM dans deux cas : celui du respect du seuil européen sur l'étiquetage des produits contenant des OGM (>0,9%) et celui du respect du seuil proposé par le HCB pour définir le « sans OGM » (<0,1%). Ces propositions ont été transcrites dans un projet de décret qui devrait être publié au Journal officiel dans les jours à venir... Or, le projet d'arrêté sur la coexistence ne prévoit que le cas de respect du seuil de 0,9%, rendant alors très difficile l'application pratique du futur décret sur l'étiquetage des produits « sans OGM ». En effet, sans l'expliciter précisément, le projet d'arrêté reprend, notamment pour la culture de maïs génétiquement modifié, les distances préconisées par le comité scientifique du HCB dans le cas du respect du 0,9% de présence fortuite de plantes génétiquement modifiées (PGM) dans un lot non GM : soit 50 mètres entre une parcelle GM et une parcelle d'une culture non GM interféconde ; soit « l'implantation, sur chaque bord concerné de la parcelle de maïs génétiquement modifié, d'une bordure d'une largeur minimale de 9 m constituée d'une variété de maïs non génétiquement modifié de classe de précocité identique à celle de la variété de maïs génétiquement modifié ». Mais le CS proposait des conditions plus complexes, intégrant notamment le décalage des semis [2]. Et surtout le CS avouait dans son avis que le respect du 0,1% serait «  extrêmement contraignant pour tous les opérateurs », obligeant quasiment à déterminer des zones de production GM et non GM. 
Cependant le président du CS a évoqué lors d'une conférence de presse qu'il souhaitait que les arrêtés n'établissent pas de distance pour le maïs mais que cela se fasse par le biais d'utilisation d'un logiciel car «  la dispersion pollinique est particulièrement sensible aux conditions environnementales ». Les conditions imposées par cet arrêté sont donc celles que l'Association générale des producteurs de maïs (AGPM) avait déjà proposées et qui avaient été adoptées par le gouvernement lors des précédentes cultures de maïs Mon810 (notamment en 2007) [3].
L'arrêté oblige aussi le nettoyage complet de tout matériel, notamment les moissonneuses, si des végétaux « non GM » sont traités après des PGM. Ce nettoyage risque d'être bien compliqué et très coûteux.

Arrêté versus décret

On cherche en vain l'objectif de seuil dans ce projet d'arrêté, car seul est défini un moyen (distance). La seule référence à un seuil se trouve dans le préambule qui évoque l'article L663-2 du Code rural et de la pêche maritime, selon lequel les règles de coexistence doivent « permettre que la présence accidentelle d'organismes génétiquement modifiés dans d'autres productions soit inférieure au seuil établi par la réglementation communautaire ». Or, rappelons-le, la réglementation communautaire actuelle n'a fixé aucun seuil de présence d'OGM, celui de 0,9% étant un seuil d'étiquetage. En se basant sur ce dernier et uniquement sur lui, le Ministre de l'agriculture transforme ce seuil d'étiquetage en seuil de présence, dans un texte qui n'a pas à le faire, ce qui est d'autant plus dommageable que les textes règlementaires prévus par la loi doivent intervenir en principe afin d'en préciser les contenus techniques. Et ce, bien que le gouvernement français ait travaillé sur un projet de décret en Conseil d'Etat sur la définition du « sans OGM », décret notifié à la Commission européenne qui n'a rien trouvé à redire et qui est donc sur le point d'être publié au JO. Or, en cas de conflit entre deux textes, c'est le décret qui l'emporte sur l'arrêté. En l'absence de précision sur un objectif d'un seuil dans cet arrêté, ce serait donc les seuils du décret qui pourraient s'appliquer. Mais concrètement, en cas de cultures de maïs GM en France, les agriculteurs qui cultiveront cette PGM seront soumis à des conditions de mise en culture définies par cet arrêté qui ne leur permettront pas de garantir le respect du décret sur le « sans OGM ». La justice devra alors trancher, mais l'objectif de la coexistence, qui est d'assurer la bonne entente entre voisins, semble d'ores et déjà perdu. Le comité éthique, économique et social (CEES) et le comité scientifique (CS), les deux composante du HCB, avaient évoqué l'importance de mettre en place une concertation et des négociations entre agriculteurs. Or cet arrêté ne parle pas de cet outil pertinent pour éviter les conflits et donc pour gérer la coexistence.

Contaminations : futurs litiges sur les responsabilités ?

Autre paradoxe : dans les considérants, le projet d'arrêté mentionne exclusivement l'avis du CS du HCB et non la recommandation du CEES... Certes, d'un point de vue strictement formel, d'après le Code rural, le gouvernement n'était tenu de consulter que le CS. Mais le CEES s'était aussi auto-saisi de cette question, considérant que la coexistence n'était pas seulement une affaire scientifique de distances mais engendrait, de fait, des questions d'organisation du territoire, de définition des responsabilités et de partage des coûts. Ces aspects ont donc été mis de côté par le gouvernement qui s'est contenté de reprendre les avis du CS sur les cultures de maïs, betterave, pomme de terre et soja pour ce qui concerne les distances en vue d'un seuil de contamination inférieur à 0,9%. De nouveaux arrêtés devront être pris si d'autres plantes génétiquement modifiées venaient à être autorisées à la culture sur le territoire européen ou si des PGM avec empilements de transgènes étaient autorisées. On notera qu'à l'heure actuelle, aucune betterave ni aucun soja ne sont autorisés à la culture en Europe...

Par ailleurs, et de façon surprenante, à l'heure où le monde de l'apiculture est en émoi à propos des OGM, le ministre ne daigne même pas évoquer ce sujet, laissant les apiculteurs pratiquement sans protection contre des contaminations très lourdes de conséquences pour eux et donc pour les végétaux, sauvages ou cultivés, pollinisés par les abeilles.



[1] La Commission européenne a un délai de trois mois pour invalider cet arrêté. Passer ce délai, il sera considéré comme compatible avec le droit européen

[2] Le CEES préconise en effet que dans le cadre de parcelle OGM et non OGM de même taille, pour garantir 0,1%, il faut « 100 m ou 50 m et 2 jours de décalage ou 20 m et zone tampon de 12 m et 2 jours de décalage ». Et dans le cadre de parcelle OGM plus grande qu'une parcelle conventionnelle, pour atteindre 0,9%, il propose une zone tampon de 12 mètres...

[3] Furet, A., Noisette, C., « FRANCE – Transposition par décret »


source : http://www.infogm.org/spip.php?article5009
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BACHELARD-JOBART, C. - L'eugénisme, la science et le droit
par Frédéric PRAT, 2001

(Note de lecture de F. Prat)


Nous croyons tous connaître la notion d'eugénisme au travers de l'épisode sanglant des nazis durant la seconde guerre mondiale. Pourtant, l'eugénisme a existé bien avant. Le mot même a été forgé en 1883, par Francis Galton, qui le définissait alors comme « la science de l'amélioration de la race qui ne se borne nullement aux questions d'unions judicieuses, mais qui, particulièrement dans le cas de l'homme, s'occupe de toutes les influences suceptibles de donner aux races les mieux douées un plus grand nombre de chances de prévaloir sur les races les moins bonnes ».

Mais « la volonté de contrôler la reproduction humaine est sans doute aussi ancienne que la fondation de la société ». Ainsi retrouve-t-on parmi les civilisations anciennes des traces de volonté eugénique : interdictions d'union d'hémophiles, ou d'épileptiques, chez les Hébreux, assassinat de bébés malades en Mésopotamie, favorisation de la reproduction des élites chez les Grecs (Platon), ou élimination d'enfants difformes (Aristote).. Qu'il s'agisse d'un eugénisme positif (reproduction favorisée chez certaines catégories), ou négatif (interdiction de reproduction ou élimination physique de certaines catégories), l'idée eugénique, même si elle a évolué selon les courants idéologiques et les pays, a toujours été présente.

La divulgation des théories de Darwin sur l'hérédité génétique (l'évolution est égale à la somme des mutations puis sélection des plus forts) a permis de critiquer les politiques qui pensaient résoudre les problèmes de santé publique et de misère par l'hygiène et l'éducation, et a donné de nombreux arguments aux thèses eugéniques de Galton, cousin de Darwin. De plus, le contexte économique et social de la fin du XIXième siècle a permis le développement de ces idées : l'industrialisation rapide a conduit à une croissance anarchique des villes dans des conditions d'hygiène déplorables. Tuberculose, syphilis, alcoolisme (considérés à l'époque comme des maladies héréditaires), font des ravages, la natalité baisse dans les classes nanties et augmente chez les prolétaires. Les eugénistes affirment alors que la société est atteinte de dégénérescence physique et morale liées aux maladies héréditaires. Il devient dès lors possible d'assimiler le social au biologique et de fonder la hiérarchie sociale sur la hiérarchie des sangs. Aux Etats-Unis, dans les années 1880, des statistiques montrent que les taux de criminalité et de déficience mentale sont en augmentation. La prise en charge de ces personnes pauvres ou malades est alors remise en cause pour deux raisons : cela coûte cher au contribuable, mais surtout, cela « propage leur genre inférieur », « permet aux plus féconds, et non aux plus aptes » de gagner. Plus surprenant, des socialistes, comme Vacher de Lapouge, du parti ouvrier français, défendent la sélectivité de type racial, et mise sur les Etats-Unis pour « organiser un programme de régénération de l'espèce humaine » : « Américains, il dépend de vous de sauver la civilisation et de faire sortir de vous un peuple de demi-dieux » affirme-t-il ainsi en 1921. Des sociétés scientifiques d'eugénisme s'organisent. Deux prix Nobel français, Charles Richet et Alexis Carel, y participent. Pour Richet (1912) : « la sélection ne sera efficace que si elle est sévère, et la sévérité, c'est l'élimination des mauvais. Or les mauvais ne vont pas disparaître de leur plein gré : il faura donc une autorité pour les éliminer de la société humaine ». Le terrain du nazisme - raciste, antisémite et eugénique- était préparé.

On pourrait naïvement pensé que tout cela fait parti du passé. Certes, les mentalités ont évolué, mais des programmes de stérilisation massive de populations handicapées ont subsisté longtemps au Danemark, en Estonie, au Japon, aux Etats-Unis (50 000 stérilisations entre 1907 et 1949), et encore récemment (années 70-80) en Suède et en Suisse. Ils existent encore en Chine. En France, on stérilise parfois les handicapés mentaux (d'après une étude récente, une femme handicapée sur trois en Gironde serait stérilisée). Par ailleurs, les nouvelles connaissances en génétique moléculaire et en procréation médicalement assistée (PMA) relancent ce débat. Un paradoxe : la génétique moléculaire s'intéresse à l'individu, et non à la situation génétique des populations. Conséquence : la disparition progressive des idées eugéniques de la biologie. Pourtant, la PMA est confrontée à des critères de choix d'ovules et de spermatozoïdes qui pourraient conduire à de nouvelles situations eugéniques. Sans parler de « l'eugénisme positif » avec des banques de sperme de prix Nobel comme il s'en est développé aux Etats-Unis (depuis 1971), ou de l'offre d'ovules de mannequins sur Internet (!), les scientifiques pratiquant la PMA tentent d'éliminer certaines maladies héréditaires en sélectionnant les donneurs : au sens strict du terme, c'est une pratique d'eugénisme négatif. Tous les jours, le CECOS en France (centre de conservation du sperme et des ovules) est confronté à cette problématique.

Mais peut-on accepter un donneur pouvant transmettre une maladie grave et incurable ? Et comment apprécier la gravité du handicap ? où est la frontière entre le pathologique et le normal ? La façon de répondre à ces questions peut rapidement déboucher sur un nouvel eugénisme. De même, les résultats d'un diagnostic prénatal (amniocentèse, échographie..) peuvent entraîner légalement une interruption de grossesse en cas de maladie grave : eugénisme ? L'auteur souligne que les conditions d'application d'une technique peuvent évoluer en fonction des désirs de la société. Ainsi, le diagnostic prénatal devait au départ détecter uniquement des maladies graves, incurables, et à survenue certaines, en tenant compte du bien-être de l'enfant et non des parents.

Mais au fil du temps, ces critères ont été abandonnés : on dépiste par exemple des becs de lièvres, on détecte des maladies curables (83 maladies génétiques détectables), on consulte les parents, et l'on peut avorter même en cas de non certitude que la maladie se développe. Il en va de même pour le diagnostic préimplantatoire (DPI) d'embryons conçus in vitro, qui en permet le tri. Et quid des thérapies géniques germinales, qui permettraient de changer, dès après le stade de la conception de l'oeuf, le génome d'une personne ? Et le dépistage systématique de la trisomie 21, si elle condamne sans doute à terme le mongolisme, n'entraîne-t-il pas une marginalisation de ces malades ?

Le débat éthique et législatif est bien toujours d'actualité. Des lois de bioéthique sont indispensables pour éviter un monde « d'enfants parfaits ».

Commentaires :

Ce livre est extrêmement bien documenté, les citations font souvent froid dans le dos. Mais peut-on suivre l'auteur lorsqu'elle parle d'eugénisme positif à propos des législations familiales et sociales des années 30 qui « transforment l'Etat libéral en Etat providence » (p. 55), en permettant à la moitié des français de bénéficier d'allocations familiales, de sécurité sociale et de vieillesse ? Il eût sans doute fallu que ces programmes fussent élargis A TOUS pour ne pas mériter ce qualificatif. Les nouvelles techniques de procréation et de dépistage ouvrent la porte à des dérives, comme l'annonce fin décembre 2002 de la naissance d'un premier bébé humain cloné. « Tout ce qui est réalisable sera réalisé » a rappelé à cette occasion le ministre français de la santé. Dès lors, ne doit-on pas faire fi de la liberté des chercheurs, et interdire certaines recherches qui pourraient conduire à des applications aux relents eugénistes ?

L'eugénisme, la science et le droit,
Catherine BACHELARD-JOBART
PUF, 2001, 342 p.

source : http://www.infogm.org/spip.php?article958

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Précurseurs et alliés du nazisme aux Etats-Unis

Publié il y a un an, le roman de Philip Roth « Le Complot contre l'Amérique » imaginait l'arrivée à la présidence des Etats-Unis, en 1940, de Charles Lindbergh. Si la victoire du célèbre aviateur, antisémite notoire et sympathisant du régime nazi, sur Franklin Delano Roosevelt relève de la fiction, l'influence du nazisme outre-Atlantique était bien réelle. A preuve les écrits de Henry Ford. Plus : les tenants américains de l'eugénisme et du racisme ont inspiré Adolf Hitler.

par Michaël Löwy et Eleni Varikas, avril 2007

Certains, comme Daniel Goldhagen, ont essayé d'expliquer le nazisme par une perversité antisémite exclusivement allemande ; d'autres, comme Ernst Nolte, dans un esprit visiblement apologétique, parlent de comportement « asiatique » ou d'imitation des bolcheviks. Et si, comme l'a si tôt perçu Hannah Arendt, le racisme et l'antisémitisme nazis avaient plutôt des sources occidentales (1), et même des filiations nord-américaines ? En effet, parmi les lectures favorites des fondateurs du IIIe Reich se trouve le livre d'un personnage américain hautement représentatif : Henry Ford. Par ailleurs, les doctrines scientifiques et les pratiques racistes politiques et juridiques des Etats-Unis ont eu un impact non négligeable sur les courants équivalents en Allemagne.

Cette connexion américaine remonte tout d'abord à la longue tradition de la fabrication juridique de la race – une tradition qui exerce une grande fascination sur le mouvement nazi dès ses origines. En effet, pour des raisons historiques, liées entre autres à la pratique ininterrompue, des siècles durant, de l'esclavage des Noirs, les Etats-Unis offrent le cas peut-être unique d'une métropole qui a exercé, et sur son propre sol, une classification raciste officielle comme fondement de la citoyenneté.

Qu'il s'agisse des définitions de la « blancheur » et de la « noirceur » qui, nonobstant leur instabilité, se succèdent depuis trois siècles et demi comme catégories juridiques, qu'il s'agisse des politiques d'immigration enviées par Adolf Hitler dès les années 1920 ou encore des pratiques de stérilisation forcée dans certains Etats plusieurs décennies avant la montée du nazisme en Allemagne, la connexion américaine offre un terrain privilégié, bien qu'aucunement unique, pour repenser les sources proprement modernes du nazisme, les continuités inavouées de celui-ci avec certaines pratiques politiques des sociétés occidentales (y compris démocratiques).

La stérilisation forcée institutionnalisée

Denoncer l'antisémitisme et le judéocide est une des composantes importantes de la culture politique dominante des Etats-Unis aujourd'hui. Tant mieux. Il règne, en revanche, un silence gêné sur les liens, les affinités, les connexions entre personnages importants de l'élite économique et scientifique du pays et l'Allemagne nazie. Ce n'est qu'au cours des dernières années que sont parus des livres qui abordent de front ces questions embarrassantes. Deux de ces ouvrages nous semblent mériter une attention particulière : The Nazi Connection (2), de Stefan Kühl, et The American Axis (3), de Max Wallace. Kühl est un universitaire allemand qui a fait des recherches aux Etats-Unis, et Wallace un journaliste américain établi de longue date au Canada.

« Il y a aujourd'hui un pays où l'on peut voir les débuts d'une meilleure conception de la citoyenneté », écrivait Hitler en 1924. Il se référait à l'effort des Etats-Unis pour maintenir la « prépondérance de la souche nordique », pour leur politique relative à l'immigration et à la naturalisation. Le projet d'« hygiène raciale » développé dans Mein Kampf prenait pour modèle l'Immigration Restriction Act (1924), qui interdisait l'entrée des Etats-Unis aux individus souffrant de maladies héréditaires ainsi qu'aux migrants en provenance de l'Europe du Sud et de l'Est. Quand, en 1933, les nazis ont mis en place leur programme pour l'« amélioration » de la population par la stérilisation forcée et la réglementation des mariages, ils se sont ouvertement inspirés des Etats-Unis, où plusieurs Etats appliquaient déjà depuis des décennies la stérilisation des « déficients », une pratique sanctionnée par la cour suprême en 1927.

L'étude remarquable de Kühl retrace cette sinistre filiation en étudiant les liens étroits qui se tissent entre eugénistes américains et allemands de l'entre-deux-guerres, les transferts des idées scientifiques et des pratiques juridiques et médicales. Bien documentée et défendue avec rigueur, la thèse principale de l'auteur est que le soutien continu et systématique des eugénistes américains à leurs collègues allemands jusqu'à l'entrée des Etats-Unis dans la seconde guerre mondiale, leur adhésion à la plupart des mesures de la politique raciale nazie ont constitué une source importante de légitimation scientifique de l'Etat raciste de Hitler.

A l'encontre d'une partie considérable de l'historiographie dominante, Kühl montre que les eugénistes américains qui se sont laissé séduire par la rhétorique nazie de l'hygiène raciale n'étaient pas qu'une poignée d'extrémistes ou de marginaux, mais un groupe considérable de scientifiques dont l'enthousiasme ne s'est pas atténué quand cette rhétorique est devenue réalité. L'étude des mutations de ces rapports entre les deux communautés scientifiques permet au sociologue et historien allemand de mettre en lumière les aspects multiples de l'influence qu'ont exercée sur les adeptes de l'hygiène raciale les « progrès » de l'eugénisme américain – notamment l'efficacité d'une politique d'immigration qui « combinait la sélection ethnique et eugéniste » – et le succès qu'a connu le mouvement eugéniste américain en faisant adopter des lois en faveur de la stérilisation forcée.

Pendant que, dans la république de Weimar, travailleurs sociaux et responsables de la santé publique se préoccupaient de réduire les coûts de la protection sociale, les spécialistes de l'hygiène raciale avaient les yeux tournés vers les mesures de stérilisation forcée pratiquées dans plusieurs Etats de l'Amérique du Nord pour réduire le coût des « déficients ». La référence aux Etats-Unis, premier pays à institutionnaliser la stérilisation forcée, abonde dans toutes les thèses médicales de l'époque. Une des explications souvent avancées pour expliquer ce statut d'avant-garde dont jouissait l'eugénisme américain était la présence des Noirs, qui aurait « obligé très tôt la population blanche à recourir à un programme systématique d'amélioration de la race ». Cette même explication sera avancée plus tard par les apologètes américains du régime nazi comme le généticien T. U. H. Ellinger, qui comparait la persécution des Juifs au traitement brutal des Noirs aux Etats-Unis.

Avec la montée du nazisme, les eugénistes américains, à l'exemple de Joseph DeJarnette, membre d'un mouvement de promotion de la stérilisation en Virginie, découvrent avec surprise et fascination que « les Allemands nous battent à notre propre jeu... ». Ce qui n'empêche pas, du moins jusqu'à l'entrée en guerre des Etats-Unis (décembre 1941), leur soutien actif aux politiques racistes des nazis, pas plus que le silence de la grande majorité des eugénistes devant la persécution des Juifs et des Tziganes, des Noirs du IIIe Reich. Certes la communauté eugéniste ne fut pas homogène, comme le montrent les dénonciations virulentes de scientifiques comme les eugénistes socialistes Herman Muller et Walter Landauer ; celles du généticien progressiste L. C. Dunn et du célèbre anthropologue Franz Boas. Mais, contrairement aux deux derniers, qui étaient critiques envers l'eugénisme, Muller et Landauer menaient une critique « scientifique » du nazisme qui, tout en niant la hiérarchie des races, reconnaissait le besoin d'améliorer l'espèce humaine par la promotion de la reproduction des individus « capables » et la prohibition de celle des individus « inférieurs ».

Un vocabulaire biologique, médical et hygiéniste

Le chapitre 6 du livre de Kühl, « Science et racisme. L'influence des concepts différents de la race sur les attitudes envers les politiques racistes nazies », apporte un démenti à la thèse canonique selon laquelle les tendances « pseudo-scientifiques » de l'eugénisme américain – responsables de la loi raciste de 1924 sur l'immigration – auraient cédé la place, dès les années 1930, à un eugénisme progressiste plus « scientifique » en rupture totale avec l'hygiène raciale.

La typologie complexe que construit l'auteur démontre que les différenciations au sein du mouvement eugéniste américain n'avaient rien à voir avec son devenir plus « scientifique ». Il souligne que la lutte à l'intérieur de la communauté scientifique internationale au sujet de la politique raciale nazie était avant tout une lutte entre des positions scientifiques divergentes relatives à l'amélioration de la race et aux moyens scientifiques, économiques et politiques pour y parvenir.

C'est la raison pour laquelle l'auteur propose deux notions – « racisme ethnique » et « racisme génétique » –, qu'il estime nécessaires pour la compréhension du phénomène étudié. Le premier fut condamné ouvertement par le tribunal de Nuremberg en 1946 ; pour le second, ce fut plus difficile. D'une part, la plupart des hygiénistes raciaux n'ont pas été jugé(e)s pour la stérilisation forcée de quatre cent mille personnes. D'autre part, la recherche récente a montré qu'une partie de l'accusation a essayé de présenter les massacres de masse et les expériences dans les camps comme des pratiques séparées de l'« eugénisme authentique ».

En 1939, Ellinger écrivait dans le Journal of Heredity que la persécution des juifs n'était pas une persécution religieuse, mais « un projet d'élevage de grande échelle visant à éliminer de la nation les attributs héréditaires de la race sémitique ». Et d'ajouter : « Mais quand il s'agit de savoir comment le projet d'élevage peut être réalisé avec la plus grande efficacité, une fois que les politiciens ont décidé de sa désirabilité, même la science peut assister les nazis. » Quelques années plus tard, Karl Brandt, le chef du programme d'élimination des personnes handicapées, déclarait devant ses juges que celui-ci avait été fondé sur des expériences américaines dont certaines dataient de 1907. Il citait pour sa défense Alexis Carrel, dont une de nos universités portait encore récemment le nom (4).

L'ouvrage de Wallace analyse les rapports avec le nazisme de deux icônes américaines du XXe siècle : le constructeur automobile Ford et l'aviateur Charles Lindbergh. Ce dernier, consacré héros de l'aviation après avoir traversé pour la première fois l'Atlantique (1927), va jouer un rôle politique significatif dans les années 1930, comme sympathisant américain du IIIe Reich et, à partir de 1939, comme un des organisateurs (avec Ford) de la campagne contre Roosevelt, accusé de vouloir intervenir en Europe contre les puissances de l'Axe.

Moins connu, le cas de Ford est plus important. Comme le montre très bien Wallace – c'est un des points forts de son livre –, The International Jew (1920-1922), de Ford (lire « Henry Ford, inspirateur d'Adolf Hitler »), inspiré par l'antisémitisme le plus brutal, a eu un impact considérable en Allemagne. Traduit dès 1921 en Allemand, il a été l'une des principales sources de l'antisémitisme national-socialiste et des idées de Hitler. Dès décembre 1922, un journaliste du New York Times visitant l'Allemagne, raconte que « le mur situé derrière la table de Hitler, dans son bureau privé, est décoré d'un large tableau représentant Henry Ford ». Dans l'antichambre, une table était couverte d'exemplaires de Der Internationale Jude. Un autre article du même journal américain publie, en février 1923, les déclarations d'Erhard Auer, vice-président de la Diète bavaroise, accusant Ford de financer Hitler, parce qu'il était favorable à son programme prévoyant l'« extermination des Juifs en Allemagne ».

Wallace observe que cet article est une des premières références connues aux projets exterminateurs du dirigeant nazi. Enfin, le 8 mars 1923, dans une interview au Chicago Tribune, Hitler déclarait : « Nous considérons Heinrich Ford comme le leader du mouvement fascisti croissant en Amérique. (...) Nous admirons particulièrement sa politique antijuive, qui est celle de la plate-forme des fascisti bavarois (5). » Dans Mein Kampf, qui paraîtra deux ans plus tard, l'auteur rend hommage à Ford, le seul individu qui résiste aux Juifs en Amérique, mais sa dette envers l'industriel est bien plus importante. Les idées de The International Jew sont omniprésentes dans le livre, et certains passages en sont extraits presque littéralement, notamment en ce qui concerne le rôle des conspirateurs juifs dans les révolutions en Allemagne et en Russie.

Quelques années plus tard, en 1933, une fois le parti nazi au pouvoir, Edmund Heine, le gérant de la filiale allemande de Ford, a écrit au secrétaire de l'industriel américain, Ernest Liebold, pour lui raconter que The International Jew était utilisé par le nouveau gouvernement pour éduquer la nation allemande dans la compréhension de la « question juive » (6). En rassemblant cette documentation, Wallace a établi, de manière incontestable, que le constructeur automobile américain avait compté au nombre des sources les plus significatives de l'antisémitisme du national-socialisme.

Comme le rappelle Wallace, Hitler fit attribuer en 1938 à Ford, par l'intermédiaire du consul allemand aux Etats-Unis, la grande croix de l'ordre suprême de l'Aigle allemand, une distinction créée en 1937 pour honorer de grandes personnalités étrangères. Auparavant, la médaille, une croix de Malte entourée de svastikas, avait été attribuée à Benito Mussolini.

Cependant, Wallace ne nous explique pas pourquoi, considérant l'abondance des travaux antisémites européens, notamment allemands, l'auteur de Mein Kampf a été à ce point fasciné par l'ouvrage américain. Pourquoi a-t-il orné son bureau du portrait de Ford, et non de celui de Paul Lagarde, Moeller Van der Bruck et de tant d'autres illustres idéologues antisémites allemands ? Outre le prestige associé au nom de l'industriel, il semble que trois raisons peuvent expliquer cet intérêt pour The International Jew : la modernité de l'argument, son vocabulaire « biologique », « médical » et « hygiéniste » ; son caractère de synthèse systématique, articulant dans un discours grandiose, cohérent et global, l'ensemble des diatribes antisémites de l'après-guerre ; enfin, sa perspective internationale, planétaire, mondiale.

« Je l'ai lu et je suis devenu antisémite »

Wallace montre, documents à l'appui, que Hitler n'a pas été le seul des dirigeants nazis à éprouver l'influence du livre fabriqué à Dearborn. Baldur von Schirach, leader de la Hitlerjugend et, plus tard, gauleiter de Vienne, déclara, lors du procès de Nuremberg : « Le livre antisémite décisif que j'ai lu à cette époque, et le livre qui a influencé mes camarades, est celui de Henry Ford, The International Jew. Je l'ai lu et je suis devenu antisémite. » Joseph Goebbels et Alfred Rosenberg figurent également parmi les dirigeants ayant mentionné cet ouvrage au nombre des référence importantes de l'idéologie du Parti national-socialiste allemand (NSDAP) (7).

En juillet 1927, menacé d'un procès en diffamation et inquiet de la chute des ventes de ses voitures, Ford s'était livré à une rétractation en bonne et due forme. Dans un communiqué de presse, il affirmait sans broncher ne « pas avoir été informé » du contenu des articles antisémites parus dans The Dearborn Independent, et il demandait aux Juifs « pardon pour le mal involontairement infligé » par le pamphlet The International Jew (8). Jugée peu sincère par une bonne partie de la presse américaine, cette déclaration a cependant permisà Ford de dégager sa responsabilité pénale. Elle ne l'a pas empêché de continuer à soutenir, en sous-main, une série d'activités et de publications à caractère antisémite (9).

« Ford précurseur du nazisme » a été largement occulté aux Etats-Unis, au profit du grand industriel moderne promoteur de la voiture fabriquée en série et vendue à bon marché. C'est cet homme que l'écrivain anglais Aldous Huxley présentait ironiquement, dans Le Meilleur des mondes (1932), comme une divinité moderne, la prière adressée à « Our Ford » remplaçant l'ancienne dirigée à « Our Lord » Notre Seigneur »).

Ce long silence gêné est compréhensible. Le « cas » Ford soulève des questions délicates sur la place du racisme dans la culture nord-américaine et sur les rapports entre notre « civilisation occidentale » et le IIIe Reich, entre la modernité et l'antisémitisme le plus délirant, entre progrès économique et régression humaine. Le terme de « régression » n'est d'ailleurs pas pertinent : un livre comme The International Jew n'aurait pas pu être écrit avant le XXe siècle, et l'antisémitisme nazi est lui aussi un phénomène radicalement nouveau. Le dossier Ford jette une lumière crue sur les antinomies de ce que Norbert Elias appelait le « processus de civilisation ».

Michaël Löwy

Directeur de recherches émérite au Centre national de la recherche scientifique (CNRS).

Eleni Varikas

Professeure à l'université Paris-VIII (Saint-Denis).

 source : http://www.monde-diplomatique.fr/2007/04/LOWY/14602

rappel d'importance :

"L'Arche de Noé végétale" : QUI AURA LA CLEF DE LA PORTE ?

Le Réseau Semences Paysanne remet en cause
"L'Arche de Noé végétale"

(Spitzberg, le 25 février 2008)

Comme l'ont rêvé tous les pirates des siècles passées, les plus grandes fortunes mondiales vont enterrer en un lieu sûr le plus beau des trésors que la terre et nos ancêtres ont légué à l'humanité et à nos enfants : les semences de toutes les plantes cultivées. Mais nous ne savons pas qui aura la clef de la porte blindée qui va les protéger.

Le 26 février 2008 aura lieu l'inauguration de « L'Arche de Noé végétale » dans un des lieux les plus reculés du monde, à Svalbard, dans le Spitzberg, en Norvège. Ce projet destiné à rassembler toutes les semences du monde dans une chambre forte est le fruit d'un accord tripartite entre le gouvernement norvégien, le « Global Crop Diversity Trust » et la « Nordic Gene Bank ». Le « Trust » -- financé et soutenu notamment par la Fondation Bill et Milinda Gates, La Fondation Rockefeller, Dupont/Pioneer, Syngenta AG, la Fondation Syngenta et la Fédération Internationale des Semences, les plus importants lobbies de l'industrie des  semences – financera les opérations de « l'Arche ».  

Le Réseau Semences Paysannes est particulièrement préoccupée par cette initiative qui concentre en un seul lieu de la planète le futur de notre alimentation.

Il constate que  bon nombre d'institutions et d'entreprises industrielles multinationales qui financent ce projet de cave de la fin du monde, mettent tout en oeuvre pour diminuer l'accès aux ressources génétiques vivantes actuelles et contribuent à leur anéantissement. En effet,

1 – Elles imposent partout des lois qui remettent en cause les droits des paysans de conserver, utiliser, échanger et vendre les semences reproduites à la ferme. Après avoir pris gratuitement dans les champs les semences sélectionnées par les paysans, l'industrie semencière y a imprimé ses empreintes génétiques(1)destinées à marquer sa « propriété intellectuelle » protégée par des Certificats d'Obtentions Végétales ou des brevets. De plus, au nom du « libre marché », les lois interdisent peu à peu aux paysans d'échanger leurs propres semences. Elles les obligent ainsi à acheter celles de l'industrie, seules à pouvoir être inscrites dans les catalogues officiels requis pour toute vente. Dans de nombreux pays, les paysans n'ont même plus le droit de ressemer leur récolte.

2 – Elles confortent l'abandon des politiques publiquesdestinées à financer les collections nationales de semences au nom de la liberté du commerce des services (2). Les collections qui ne sont pas simplement jetées à la poubelle sont concentrées dans d'immenses banques internationales où les semences ne sont inventoriées que par des numéros illisibles pour les paysans qui voudraient retrouver celles qui ont été prises dans leurs champs. Elles sont aussi réduites à des listes de gènes numérisées dans des ordinateurs destinés à préparer les manipulations génétiques assistées par marqueurs moléculaires.

3– Elles mobilisent des milliards de dollars pour financer les biotechnologies destinées à marquer les semences avec des gènes brevetés, et à les rendre stériles pour que les paysans ne puissent plus ressemer leur récolte. Le rêve fou affiché est de fabriquer la totalité des plantes de demain avec des gènes synthétiques: les nouveaux pirates espèrent ainsi n'avoir même plus besoin de la clef du coffre de l'Arche de Noé, mais seulement de celle de l'ordinateur où seront stockés la totalité des séquences génétiques des graines qui y sont enfermées.

4- Elles généralisent la culture des organismes génétiquement modifiés (OGM) par des stratégies commerciales agressives  mettant en danger la diversité des semences fermières. Ces OGM brevetés sont aujourd'hui dispersés autour des dernières collections, dans les banques de semences et dans tous les centres d'origine et de diversification des plantes cultivées qu'ils contaminent les uns après les autres.

Le Réseau Semences Paysannes demande, conformément aux accords internationaux sur la biodiversité (3) :

- Que chaque pays de la planète reconnaisse et protège activement dans ses lois nationales et dans ses politiques agricoles les droits des paysans de conserver, utiliser, échanger et vendre les semences reproduites à la ferme.

- Que toutes les semences enfermées dans les collections soient mises à la disposition des pays et des paysans et paysannes à qui elles ont été prises, et que la priorité soit accordée à la conservation et au développement de la biodiversité dans les champs.

- Que les sommes aujourd'hui consacrées aux recherches en biotechnologies végétales soient suspendues et reconverties pour financer les programmes de sélection participative destinés à permettre aux paysans de continuer à contribuer à la conservation dynamique des variétés végétales et au renouvellement de la biodiversité en plein air, dispersés dans les millions de terroirs de la planète.

Enfermée dans une grotte, la biodiversité périra si elle ne peut en ressortir pour être cultivée. Elle ne sera sauvée que si elle est librement conservée et renouvelée dans les champs des paysans.

Pour plus d'informations :

Nicolas Supiot : 0 (033) 6 50 01 13 29
Guy Kastler : 0 (033) 6 03 94 57 21

(1) «  Homogénéité et stabilité » pour le COV, « évènement génétique » pour le brevet
(2) Accord Général sur le Commerce des Services
(3) Convention sur la diversité biologique, Traité International pour les Ressources Phytogénétiques pour l'Agriculture et l'Alimentation


http://www.semencespaysannes.org/arche_noe_vegetale_qui_aura_clef_porte_115-actu_38.php









30/01/2012
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